Badminton : des idées pour aider

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Marine Duréault, enseignante à l’université de Rennes, nous livre les contraintes et les aménagements qu’elle met en place pour aider à la transformation de la motricité des élèves (apprentissages de techniques tout en jouant) et qui participent à l’augmentation de temps de pratique des élèves. (cf. photos sur le site)

Les aménagements matériels : des contraintes et aides efficaces pour apprendre

Baisser le filet
Cela paraît évident, une bande du filet plus haute que la taille du joueur, de la joueuse, l’incite à produire des trajectoires qui montent le volant.
Si l’on veut que les élèves apprennent à smasher par exemple, ou si l’on veut privilégier la vitesse, il est indispensable de régler la hauteur des filets en fonction de la taille des élèves, quitte à avoir des terrains à différentes hauteurs de filet.

Les dimensions du terrain
Pour des débutants
Ils ne peuvent envoyer un volant au fond du terrain adverse depuis leur propre zone de fond.
Si le volant est envoyé dès le service dans le couloir du fond, le receveur, la receveuse est dans l’incapacité de construire le point.
Aussi, le couloir du fond de court est interdit lors du service.
Pour rééquilibrer un rapport de force
Si deux élèves physiquement très différents se rencontrent, l’un très puissant par rapport à l’autre, on peut rééquilibrer le rapport de force en diminuant la profondeur du terrain (zone de fond interdite) que vise le plus puissant.
Lors d’un travail en dyade dissymétrique
Le meilleur joue sur un terrain entier, l’adversaire plus faible gère un demi-terrain sur son espace coup droit (demi terrain droit pour un droitier).
L’incertitude spatiale est diminuée pour l’élève le plus faible. Quand cet élève n’est pas sous pression temporelle, il est intéressant d’observer comment il/elle s’engage dans le duel, comment il/elle utilise la profondeur et la latéralité. Ses déplacements sont moins importants.
A contrario, la cible plus petite contraint le meilleur à plus de précision, à une gestion de déplacements (changements de direction) plus importante et d’une dépense énergétique plus grande.

Les repères verticaux et les cibles horizontales
Les cibles horizontales sont souvent exploitées, plus rarement les repères verticaux qui sont pourtant indispensables aux apprentissages car ils sont à la fois des contraintes pour transformer (augmenter le volume de jeu) mais aussi des critères de réussite simples.

Comment ça marche ?
Il suffit d’utiliser 2 tiges de 2cm de diamètre et d’environ 2m de hauteur de chaque côté du filet, munies à leur extrémité d’élastiques dans lesquels viennent se fixer les extrémités d’un ruban de rubalise. Est ainsi matérialisé un espace entre le filet et la rubalise (sur-filet).
A quoi ça sert ?
Pour chaque trajectoire émise, le volant doit passer entre la bande blanche du filet et la rubalise.

Une contrainte organisatrice
Pour raccourcir le geste et gérer une vitesse de jeu plus grande (lors de la production de drive).
Matches très courts (environ 2’30) sur ½ rectangle central, face à face.
Le sur-filet augmente la vitesse du volant. Cela donne moins de temps entre les frappes car un volant qui part vite revient souvent vite. Cela contraint peu à peu à réaliser un geste plus court pour impacter le volant et, surtout, cela amène à conserver le tamis dans le champ visuel au lieu de le laisser descendre après l’impact. Le coude se libère pour amener la tête de raquette plus haute, la main devient plus disponible. Il devient nécessaire d’aller vers le volant et ne plus se contenter de l’attendre.
La vitesse amène par ailleurs un relâchement des doigts pour permettre le « relâché-serré » du manche à l’impact, et générer la frappe « rebond ».
Rencontrer plusieurs adversaires pour apprendre à repérer les failles adverses.
Bien sûr, il faut laisser du temps pour que les transformations se mettent en place.
Variante : on peut faire la même chose en dessinant des 8 : l’un joue en croisé, l’autre droit.
Pour apprendre l’amorti
Jeu de concours, un challenge.
Un relanceur, un joueur qui réalise les amortis.
Lors de l’impact, la trajectoire doit être directement descendante, le volant doit passer entre la bande du filet et la rubalise. La trajectoire est « piquée ».
Au début les élèves fléchissent le poignet avec un bras tendu ou baissent le coude et bloquent le geste pour ralentir le geste. Or il est question dans l’amorti d’un ralentissement actif (à la frappe) comme le freinage ABS qui ralentit sans bloquer. Cela nécessite des dissociations fines pour avoir la même préparation que pour les autres frappes hautes et contrôler le ralentissement. Cela prend du temps.
Pour apprendre le dégagement de fond de court
La rubalise est positionnée à mi court à environ 2,50m de hauteur. (Si c’est possible installer des crochets sur le mur de part et d’autre pour l’installer sur toute la largeur du gymnase). Le volant doit passer au- dessus.
Pourquoi ? Un dégagé est efficace si le volant passe au-dessus de l’envergure de l’adversaire (c’est à dire raquette levée) et si le volant arrive dans le fond de court.

Concours
Les buts peuvent être différents :
Soit réaliser le moins de frappes hautes en 15’’. La visée est ici défensive. Il s’agit de frapper le volant au-dessus de la tête et devant. La trajectoire est de plus en plus parabolique.
Soit réaliser le plus de frappes hautes en 15’’. La visée devient offensive.
Pour amener une accélération du geste à la frappe (donc de la longueur), il est indispensable de combiner à ces repères verticaux des cibles horizontales.
Représenter 3 cibles au sol (bandes antidérapantes ou plots sur les côtés du terrain) : le couloir du fond de court puis deux autres de la même largeur que ce couloir. On peut aussi ajouter un surpoids en tête de raquette pour favoriser l’accélération du geste.

CR : passer au-dessus de la rubalise et atteindre Z1 ou Z2 ou Z3.
L’atteinte de la cible la plus éloignée(Z3) est valorisée : 3pts, puis 2pts pour celle du milieu (Z2), 1pt pour celle qui est la plus proche du filet (Z1).

Pour le smash
Utilisation d’une cible verticale qui est à viser. Elle est placée à différents endroits sur le terrain, sur l’axe de la profondeur. Cela pour apprendre à varier l’angulation de cette trajectoire.

Des ballons de baudruche pour les petits
Pour les petits ou ceux et celles qui éprouvent de grosses difficultés lors du service (pas de dissociation des 2 bras), il est intéressant de remplacer les volants par des ballons de baudruche peu gonflés.
Ils ont le coude dans les côtes car ils cherchent à voir la raquette et le volant simultanément. Le volant est touché mais monte vers le haut et va très peu vers l’avant.
Le ballon de baudruche a une trajectoire plus lente lorsqu’il est lâché. L’élève accepte progressivement de ne plus voir le tamis qui passe derrière et permet un trajet plus long de la raquette. La consigne est d’aller toucher le ballon en bas et devant soi. Ensuite, quand l’anticipation-coïncidence est créée, alterner l’utilisation de ballons et de volants.

Les distributeurs de volants
Des tubes réservoirs de volants
La quantité de pratique est déterminante pour les progrès et les transformations.
Récupérer les volants sans perdre de temps permet un important enchaînement de coups.

Deux relanceurs-ses pour créer une survitesse
Par exemple, pour des élèves qui « pistonnent » et alignent œil/main/raquette/volant lors des frappes hautes. Ils ne peuvent produire de trajectoires hautes et longues de dégagement de fond de court. On retrouve le même aménagement et critères de réussite (cibles horizontales et repère vertical) que dans la situation pour le dégagement de fond de court.
Consignes : les relanceurs envoient le volant haut et devant (et pas sur) le/la joueuse en Z1.
Dès que le joueur a frappé un volant, le 2e relanceur envoie le sien.
Le joueur n’a pas d’autre choix que de changer son organisation. En effet la survitesse amenée par la distribution ne permet pas à l’élève de retrouver son mode d’organisation initial (l’alignement évoqué auparavant).
L’objectif premier de cette situation qui est de supprimer la frappe en piston va être peu à peu atteint. Le tamis va passer derrière la tête du joueur avec le coude qui monte et va ainsi permettre d’accélérer le geste pour aller frapper le volant.

Les routines se travaillent le plus possible en situation de matches pour préserver l’intentionnalité et amener des répétitions plus efficaces car elles prennent sens. Proposer des routines perpétuelles avec ¾ frappes maximum en match de 2’30.

La balade des bouchons : un jeu qui contraint à prendre des informations et analyser le rapport de force

Objectifs

  • S’engager énergétiquement.
  • Produire un dégagement de fond de cours efficace pour se donner du temps.
  • Réorganiser rapidement ses appuis pour être disponible.
  • Construire l’échange pour contraindre l’adversaire à ne plus avoir comme solution que d’envoyer le volant dans l’espace proche du filet.
  • Gérer son émotion en particulier lors de la production de la trajectoire de rupture.
  • Apprendre à être régulier et précis.

Organisation
Matches par poules de niveau.
Durée : les matches sont courts, maximum 6mn.
Les matches se déroulent au temps, il faut marquer le plus de points en 6mn.
Chacun des 2 joueurs a un bouchon (choisir le plus épais des tubes de volants) et le dépose derrière son terrain.
But : tout en jouant, amener le bouchon sous le filet pour marquer.

Règles :

  • Je n’ai pas le droit de prendre le bouchon juste après avoir servi.
  • Si j’attrape le bouchon et que je gagne l’échange, je le garde en main.
  • Si j’attrape le bouchon et que je perds l’échange, je le replace derrière mon terrain.
  • Quand j’ai le bouchon en main, je ne peux pas le poser sous le filet juste après avoir servi.
  • Si je pose le bouchon mais que je perds l’échange, je le replace derrière mon terrain.
  • Et une dernière règle importante : quand je pose le bouchon sous le filet, mon adversaire doit pouvoir encore frapper au moins une fois le volant.

Critère de réussite : je marque un point après avoir posé le bouchon et gagné l’échange.

Ce que permet d’apprendre ce jeu
Cela contraint à analyser la situation de jeu, repérer le meilleur moment pour déposer le bouchon. La dernière règle oblige à rester vigilant pour être disponible juste après avoir posé le bouchon. D’autre part, le fait que l’adversaire puisse frapper le volant après la pose du bouchon permet d’envisager l’inversion du rapport de force.
Ce jeu nécessite aussi des déplacements efficaces pour se placer correctement par rapport au volant et frapper le volant en position équilibrée.
Il apprend encore à gérer ses émotions notamment lors de la dernière frappe, quand le joueur sait qu’il a tout fait pour gagner. Sa frappe doit être précise.
La contrainte de temps, 6mn, impose de gérer la contradiction risque/sécurité : comment s’organiser pour marquer ?

Au départ du jeu, laisser du temps pour que les élèves s’approprient les règles.
Ensuite, ils éprouvent un réel plaisir à s’engager dans ce jeu qui exige un engagement physique très important et de conserver sa lucidité.

Article paru dans le Contrepied Hors-Série n°8 – Badminton