Handball : et si le duel tireur/ gardien était le commencement ?

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« Je n’ai eu qu’une seule remarque sur mes propositions, remarque qui au départ m’a profondément choqué : «pour toi le hand ball semble se résumer au tir.» L’auteur Daniel Peloffi présente son expérience professionnelle dans la construction et la validation de contenus d’enseignement en Hand-ball d’un un collège de l’Isère.

Le texte qui suit traite d’une approche personnelle de l’enseignement du handball élaborée au cours d’une vingtaine d’années de 1970 à 1990 environ, période au cours de laquelle le tir conçu comme un duel essentiellement bio-informationnel entre le gardien et le tireur, s’est peu à peu imposé comme une voie d’entrée privilégiée pour les débutants dans le cadre scolaire.

Accessoirement il traitera aussi des obstacles en termes de contraintes matérielles ou conceptuelles auxquels s’est heurtée cette approche dans sa mise en œuvre, pour tenter d’identifier les freins potentiels à la généralisation de cette innovation.
Ce texte est une reconstruction, dans la réalité le déroulement des évènements a été beaucoup plus chaotique et irrationnel que ce qui est présenté ici.

Le début d’une réflexion

Avant de poursuivre il me semble important de préciser que j’ai reçu une formation de gardien de but puis d’entraîneur dans le cadre fédéral ce qui a fortement influencé ma démarche. J’ai également eu la chance d’appartenir à une équipe pédagogique stable et extrêmement dynamique qui a élaboré un projet d’établissement original, avant de participer au GRAF sports collectifs (groupe de recherche d’action formation mis en place dans l’académie de Grenoble) dont le but était de fournir un recueil de situations «validées» utilisables dans l’enseignement ainsi qu’un pool de formateurs disponibles dans les différentes APS, pour la FPC. Dans ce cadre, chaque participant devait proposer quelques situations qui étaient étudiées et critiquées par les membre des autres GRAF avant d’être publiées par l’IFM.(institut de formation des maitres – antérieur aux IUFM)

Je n’ai eu qu’une seule remarque sur mes propositions (remarque qui au départ m’a profondément choqué) : «pour toi le hand ball semble se résumer au tir.» Après examen, il m’apparut que toutes mes situations conçues pour des débutants, concernaient des duels tireur/gardien plus ou moins aménagées pour provoquer des ajustements de part et d’autre, démarche inconsciente de ma part à ce moment-là. Cette prise de conscience m’a conduit à vouloir passer d’une démarche intuitive à une démarche organisée ce qui supposait de trouver une justification théorique à cette entrée dans l’activité. Il m’a semblé que le développement de compétences relatives au tir, aidait à organiser et à donner un sens à toutes les actions individuelles ou collectives qui précèdaient le tir au cours du match et cette clarification du fonctionnement de la cible et du but à atteindre me semblait sous-estimés dans l’enseignement traditionnel. De même le fait que tous les élèves constatent concrètement l’impuissance d’un gardien seul face à un tireur devait les amener à concevoir sa protection comme allant de soi. Parallèlement et après expérimentation avec mes collègues non spécialistes de sports-co, mes mini situations se sont avérées trop complexes et inexploitables par un enseignant confronté à la gestion d’une classe sur un terrain ne comportant que deux buts. Comme quoi la conception que j’avais de la validation était à travailler.

La mise en œuvre se présente en deux parties qui étaient étroitement imbriquées dans la réalité (la 1° sur la construction d’une situation de tir, la 2° sur l »organisation des matches).

La construction d’une situation

Le problème dans une démarche de construction et de validation de contenus c’est que le temps est compté, quand le cycle de Hand est terminé l’expérimentation piétine. J’ai donc utilisé différentes ressources, d’abord mes collègues avec qui je participais à l’élaboration d’un projet d’établissement dont une des idées directrices était « de permettre à chaque élève d’atteindre son plus haut niveau de compétences possible dans les APS proposées » ; puis les stagiaires de l’UFRAPS ou de FPC qui se sont vus confier des classes entières avec pour tâche de trouver des solutions matérielles acceptables aux problèmes que pose l’enseignement du tir dans un contexte scolaire « normal ». L’objectif clairement « imposé » était de trouver des situations d’apprentissage fonctionnant quasiment toutes seules pour permettre à l’enseignant d’observer les élèves afin d’intervenir de manière individualisées sur les difficultés rencontrées. Accessoirement, l’objectif réel pour favoriser la diffusion de ces situations était de faciliter la gestion de la classe et « la vie » de l’enseignant,.

L’utilisation du terrain dans sa longueur s’étant rapidement révélée insatisfaisante, une des stagiaires a suggéré de se servir des six tapis pleyels récemment achetés pour la gymnastique comme buts, et de délimiter six espaces de travail avec des plots en travers du gymnase pour augmenter le rendement (4 à 5 joueurs par espace avec un ballon chacun) et réduire les inters actions source de conflits entre eux. L’achat de trente ballons de petite taille pour les 6° (selon Constantini le tireur devait pouvoir lancer le ballon « comme un caillou» et par ailleurs les gros ballons difficilement maîtrisables sont source d’accidents avec le gardien) allait dans le même sens.
Afin de renforcer l’aspect bio-informationnel du duel, trois zones verticales ont été tracées à la craie sur les tapis et seuls les buts marqués dans les deux zones latérales comptaient. Cet aménagement devait permettre au gardien ou au tireur de faire des choix susceptibles d’induire des réponses exploitables par l’adversaire.

Les consignes avaient pour but de limiter les risques pour les gardiens:

  • les groupes devaient être constitués d’élèves de même niveau,
  • interdiction à deux joueurs de tirer en même temps sur le même gardien,
  • attendre que le gardien soit prêt avant de se lancer,
  • tout le monde passe gardien, les tireurs ou les gardiens fonctionnent sous forme de défis (3 pénalties chacun par exemple).

Le jour où l’enseignant et les trois stagiaires d’alors ont pu rester assis pendant trente minutes sans intervenir, la situation a été validée.

Cette situation de départ évoluait de façon imprévisible en fonction des observations et de l’imagination des stagiaires. Mais si ces derniers se sont révélés très compétents pour animer les séquences de recueil de solutions et leur diffusion à l’ensemble de la classe, ils n’ont pas réussi le plus souvent à dépasser le simple constat des élèves.

Par exemple : le tir au rebond ça marche !

  • Dans un tir au rebond la partie de la trajectoire qui pose problème au gardien parce qu’elle le prive de temps pour lire et intervenir, se situe aprés le rebond ce qui suppose que ce rebond s’effectue en dehors de l’axe tireur/gardien et un peu en avant de sa position.
  • C’est pour la même raison que quand le gardien attend le tir en avant de sa ligne de but, cela ferme l’angle du tireur et peut provoquer un tir hors des buts ou permet de pouvoir attaquer le ballon dans la première partie de la trajectoire plus facile à décrypter.

Ces connaissances permettent de maintenir l’intérêt des élèves qui comprennent et expérimentent ainsi de nouvelles solutions.
De plus, si l’idée apparemment loufoque d’un des stagiaires (qui avait demandé au gardien de défendre à cloche pied pour faciliter la réussite du tireur), permet de découvrir qu’un gardien qui amène le poids de son corps sur un de ses appuis ne peut plus utiliser cet appui pour intervenir sur le ballon, alors les perspectives d’expérimentation se multiplient.

  • Si on demande par exemple au tireur d’orienter son impulsion en direction d’un des espaces à atteindre ceci va obliger le gardien à se déplacer et permet d’utiliser soit l’espace libéré soit le tir au rebond du côté du pied d’appui du gardien.
  • De la même façon le gardien doit apprendre à se déplacer en pas chassés rapides le poids du corps vers l’avant des appuis pour pouvoir intervenir sur les balles basses.

Ces comportements apparemment complexes sont assez rapidement accessibles à une partie des élèves de 6° mais leur acquisition par tous suppose la maîtrise de séquences motrices préalables, ce qui justifie le choix de groupes de niveau qui facilitent l’intervention individualisée de l’enseignant dans une même séance.

Ces séquences motrices qui se situent entre le moment où le dribbleur tente de récupérer le ballon et l’armé du tir, se sont révélées difficiles à repérer et à traiter par les stagiaires.
Le constat était le suivant :
Soit le ballon était perdu au moment de la récupération soit le tir se faisait dans la foulée et directement sur le gardien le tireur étant incapable, de dissocier l’impulsion de la suspension et d’utiliser la rotation des épaules par rapport au bassin qui permet un meilleur armé et provoque une incertitude quant au moment du lâché du ballon.

Parmi les remédiations proposées celle qui consistait sur une distance donnée, à compter les dribbles et à diminuer d’un dribble à chaque nouveau passage, a donné de bons résultats car elle provoquait un changement de posture du dribleur et permettait un meilleur enchaînement des séquences dribbler- ramasser la balle-courir-sauter et tirer ou tirer rapidement pour prendre le gardien de vitesse. L’introduction d’un poursuivant a également permis un enchaînement plus efficace.

Ce travail favorisait l’acquisition du règlement par les élèves en particulier au niveau du contact :
on peut stopper le dribbleur sans le déséquilibrer en intervenant sur le ballon quand celui-ci n’est plus contrôlé. L’évolution se faisait en diminuant la distance entre le poursuivant et le tireur ou en introduisant le défenseur latéralement.

Avec les niveaux plus avancés, des attaques/défense en 2 contre 1 3 contre 2 ou 2 contre 2 toujours dans la même situation, permettent d’aborder des notions qui pourront être reconnues, utilisées et renforcées pendant les matches telles que :
le tir par-dessus la défense, la fixation, la passe décisive, la liaison interception /contre-attaque, l’appel de balle vers les espaces libres et la passe dans la course du futur réceptionneur, le bloc pour libérer des espaces, la conservation du ballon en cas d’échec de l’attaque, la dissuasion, le harcèlement.

Le cas du harcèlement est intéressant car il est le plus souvent interdit dans le souci de protéger le débutant et de faciliter l’arbitrage. Du coup, le problème est supprimé sans que l’élève ait la moindre chance de trouver des solutions en recherchant un soutien ou en tentant de renverser le rapport de force par un dribble de débordement. Cela supprime également l’idée de provoquer la faute de l’adversaire pour permettre à un partenaire de récupérer le ballon.

C’est l’occasion de découvrir le contact légal qui favorise réellement l’arbitrage en clarifiant pour tous, ce qui est permis ou interdit sans changer la nature de l’APS. Au hand-ball le contact est toléré et, si frapper le ballon dans les mains du porteur, le ceinturer ou le déséquilibrer est interdit on peut le toucher et même tenter de poser la main sur le ballon pour provoquer une mauvaise passe. Je pense que ce traitement de l’APS peut changer la philosophie de l’enseignement : plutôt que de subir une situation désagréable il vaut mieux apprendre à faire face.

Au-delà des contraintes matérielles déjà évoquées, les principaux freins à l’acceptation de cette entrée dans l’activité, identifiés chez les stagiaires mais que l’on retrouve chez bon nombre d’enseignants, sont les suivants :

  • le tir est dangereux pour le gardien et le rôle de l’enseignant n’est pas de mettre ses élèves en danger
  • le tir nécessite de la puissance ce qui exclue automatiquement les petites filles de 6° par exemple
  • le tir relève de l’individuel alors que la passe fait référence au collectif ce qui rend son utilisation beaucoup plus «éducative»
  • les groupes de niveau créent une hiérarchie entre les élèves et vont à l’encontre de la mixité
  • C’est une approche «techniciste» qui va marginaliser les élèves les plus faibles

Ces représentations sont du domaine des croyances donc très résistantes (y compris en faisant appel à des arguments discutables, par exemple cette approche modifie tellement l’activité des filles sur un terrain qu’on lui a reproché de «viriliser les filles»), mais dans la pratique aucun de ces a priori n’a résisté à l’épreuve des faits.

L’organisation des matches

Dans le projet d’EPS du collège certaines activités bénéficiaient de temps de pratique important, soit parce que les conditions matérielles était favorables soit parce que les enseignants membre des GRAF avaient réfléchi sur des contenus innovants. Dans le projet hand ball les cycles de 10 séances de deux heures regroupaient deux classes de même niveau qui fonctionnaient en alternance, une heure consacrée au tir dans le gymnase l’autre aux matches à l’extérieur.

Les matches se déroulaient à 7 contre 7 en 2 groupes de niveau, débutants ou confirmés, l’enseignant dirigeant le jeu. L’obstacle principal à cette organisation a été la conception du rôle que l’on faisait jouer au matches dans l’apprentissage, pour certains le match était un instant de détente pour les élèves et devait se situer impérativement en fin de séance. La solution consistait donc à transformer les matches, en temps d’apprentissage sans faire baisser la motivation.

Les enseignants de l’UFRAPS membre du GRAF ont introduit deux idées innovantes pour l’époque qui ont joué un rôle important dans cette évolution : faire jouer les matches à effectifs réduit pour donner le temps au débutant de s’informer et de décider, et évaluer les joueurs sur le modèle de la NBA en comptabilisant pour chacun le nombre d’actions qui favorisaient le rapport fe force pour leur équipe. (ex: les rebonds, la passe décisive, les paniers réussis). Ces idées ont eu beaucoup de mal à s’imposer dans la profession, car non seulement elles allaient à l’encontre des idées reçues (le hand se joue à 7 et ensuite, hiérarchiser les élèves à l’intérieur d’une équipe posait problème) mais surtout elles compliquaient considérablement la tâche de l’enseignant car, diminuer le nombre de joueurs par équipe revenait à augmenter le nombre d’équipes donc de joueurs inactifs sur la touche, joueurs qui ne restaient pas longtemps inactifs surtout si le professeur était occupé à évaluer.

L’équipe d’EPS a décidé de relever le défi en traçant deux terrains de hand contigus dans la cour du collège. Sur chaque terrain trois équipes se confrontaient dans un tournoi, à 5 contre 5 pour les confirmés 4 contre 4 pour les débutants, la troisième équipe fournissant arbitre, marqueur chronométreur et (nouveauté) : observateurs. La durée des matches étant de 6′ à 7′. L’ordre des matches, le nom des joueurs dans chaque équipe avec plusieurs colonnes où étaient recensées les actions déterminantes de chaque joueurs ainsi que le nombre de matches arbitrés, étaient inscrits sur deux tableaux amovibles de manière à ce que le résultat du tournoi, l’implication en tant que gestionnaire du tournoi et l’efficacité des joueurs dans le jeu soient vérifiable par chacun.

L’enseignant devenait un animateur de séquences d’apprentissages en introduisant des thèmes de jeu en fonction de l’objectif du moment :

  • Par exemple pour attirer l’attention sur la liaison récupération du ballon-contre attaque, le but vaut 2 points s’il est marqué dans les 5 secondes qui suit la récupération soit sur touche, coup franc, interception ou passe du gardien. L’observateur muni d’un chrono valide ou non l’action.
  • Parmi les thèmes possibles celui qui amenait le élèves à réfléchir sur la pertinence du dribble ou de la passe s’est révélé intéressant car il permettait de contrer la tendance de certains joueurs à monopoliser le ballon :
    dans un premier match une équipe jouait sans dribbles sous peine de coup franc l’autre était libre, au deuxième match les rôles s’inversaient, aux troisième les équipes élaboraient leurs stratégie en fonction des résultats obtenus précédemment.
  • Un tournoi à 3 équipes en 10′ sans interruption avec pour thème : l’équipe qui prend un but sort, donnait lieu à des stratégies nouvelles pour rester sur le terrain le plus longtemps possible, en particulier en renforçant les défenses (adopter une zone par exemple) ou en utilisant le gardien de manière inhabituelle (jouer hors de sa zone pour stopper les contre attaques ou choisir le meilleur joueur comme gardien).
  • Un des axes de travail consistait a faire varier la pression que subissait une équipe en lui demandant de jouer en infériorité numérique pendant un temps donné comme lors d’une exclusion, pour renforcer l’activité défensive et offensive de ses joueurs.

Les jeux à thème alternaient avec des matches où les élèves étaient évalués sur les actions jugées déterminantes par l’enseignant chaque action étant recensée sur les tableaux. Parmi ces actions la passe décisive, définie comme la passe qui met un tireur en situation favorable (sans que le défenseur ne puisse intervenir sans être sanctionné), le tir ou le but, l’interception, étaient valorisées.

D’autres sports collectifs bénéficiaient de l’expérience acquise en hand-ball ; la compréhension du fonctionnement de la cible en foot et basket occupait l’essentiel des séances qui étaient moins nombreuses dans le projet EPS.

A ce stade il me semble important de souligner le rôle joué par la FPC dans la construction de ces contenus. En effet, entre temps ma situation avait changé et j’avais obtenu le poste d’EFC (enseignant-formateur-chercheur) poste créé par l’inspection et attribué a chaque GRAF à tour de rôle pour 4 ans, dans le but d’amener plus de rigueur dans leur travail. En échange d’une décharge horaire de 8 heures, l’enseignant s’engageait à animer 20 journées de FPC prises sur son temps libre, à entrependre une formation dipômante (maîtrise, DEA, et même thèses pour certains) et à participer aux différentes commission EPS dont l’éphémère mais passionnant « observatoire des pratiques » qui avait pour but d’identifier les pratiques réelles des enseignants sur le terrain dans les différentes APS.
Le fait de s’impliquer de manière importante dans la FPC m’a permis de confirmer l’inefficacité du prêt à porté didactique quelque soit sa pertinence supposée.
L’idée directrice a donc été de transformer ces journées en temps d’expérimentation et de validation avec des classes ordinaires, tout en choisissant les thèmes de travail de manière à faire évoluer la conception de l’APS aux yeux d’une partie des stagiaires. Par exemple, comment faire du tir un moment d’apprentissage ? ce qui a permis de mettre en évidence les limites des solutions telles que le plinth comme gardien ou des cibles dans les buts sous forme de cônes ou de foulards, pour aller vers une conception plus bio-informationnelle. La suite s’imposait d’elle-même : comment mettre en œuvre sur le terrain ce projet sans compliquer la tâche de l’enseignant ?

La question comment constituer des groupes de niveau de manière incontestable quand on n’est pas spécialiste du hand-ball a été un moment important puisqu’elle a fait basculer l’intérêt des participants vers l’identification de la grille de lecture des « experts » .Petit à petit un protocole s’est dégagé : demander à des entraîneurs d’utiliser l’oeil du maquignon, et comparer leur résultat avec ceux obtenus par les stagiaires à partir d’observables supposés être révélateur d’un niveau. Cette démarche a fait émerger les différents comportements qui influencent le rapport de force ; les lister et les repérer au cours d’un match a changé le regard que certains enseignants portaient sur les élèves confrontés aux fondamentaux de l’APS, (voir le harcèlement par exemple). Accessoirement elle a aussi permis d’identifier le tir comme observable fiable et suffisant pour constituer des groupes de niveau. Tous les joueurs qui tirent ou qui marquent au cours d’un match entre deux équipes hétérogènes formées à partir de la taille des élèves, à 7contre 7 pendant 7′ peuvent appartenir au niveau 1 sans discussion.
Le tir s’étant révélé insuffisant pour classer les joueurs dans un même niveau, la passe décisive et l’interception lui ont été adjoint dans des matches à effectifs réduits et ont donné des résultats jugés suffisamment proches de ceux des experts pour être retenus. Les tentatives pour passer de ce recueil d’informations à une note se sont révélées infructueuses en partie parce que l’écart entre les tenants d’un courant qui ne voulait prendre en compte que le niveau obtenu et ceux qui mettaient l’accent sur les progrès réalisés n’a pu être réduit.

Un mot sur l’observatoire des pratiques dont la brève existence n’a pas autorisé l’exploitation des résultats recueillis mais qui a confirmé le fait que l’entrée par le tir, les groupes de niveau et le jeu à effectif réduit constituaient bien une innovation du moins dans la région et à l’époque évoquée. Sur 20 séances de hand-ball observées avec l’accord des enseignants, aucune ne comportait d’apprentissage organisé du tir, toutes se déroulaient selon le même schéma : les matches à 7 contre 7 avaient lieu directement après un échauffement à base de dribbles et de passes, dans une seule les matches s’effectuaient par groupes de niveau décidés par l’enseignant, dans les autres les élèves composaient eux même des équipes forcément hétérogènes l’enseignant se situant comme arbitre, dans deux séances le même thèmes de jeu étaient censé maintenir la motivation des élèves : les buts des filles valent 3 points. Une seule séance portait sur l’évaluation, l’enseignante comptait le nombre de passes réalisées par les élèves, plus ce nombre était élevé plus la note était élevée. Pour augmenter le score des plus faibles, ils devaient réaliser toutes les remises en jeu qui leur comptaient comme une passe.

Vers un bilan

Ce projet hand-ball a fonctionné tel que décrit ci-dessus pendant de nombreuses années ce qui prouve sa faisabilité dans certaines conditions. Il a permis entre autre effet de traiter différemment le problème de la motivation des élèves (qui est une préoccupation récurrente et obsessionnelle des enseignants pendant les stages de FPC). Peut-être parce que dès le départ le projet d’EPS avait pour objectif d’élever le niveau de compétence des élèves et de leur permettre de l’exprimer et de le vérifier sur le terrain dans chaque APS programmée.

Mais à mes débuts, livré à moi-même et étant passé par l’utilisation du plinth, des cônes et foulards et même par le thème des 3 points pour les filles, je mesure le temps et l’immense concours de circonstances qu’il a fallu pour en arriver là.
Ces remarques jettent un nouvel éclairage sur les recommandations officielles d’alors qui demandaient à l’enseignant de se comporter en didacticien. Parallèlement une des pistes à explorer en FPC (si elle existe encore) serait d’inverser la représentation qui veut que la gestion de la classe est prioritaire et permet l’enseignement, pour aller vers une représentation où les contenus d’enseignement facilitent la gestion de la classe et les apprentissages.

Les GRAF, EFC ayant disparus, je ne doute pas que la formation actuelle des nouveaux enseignants leur permette de faire face avec brio à ce défi.