Carrefour : sport et innovation

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Intervention de Jean Pierre Lepoix lors des 6èmes assises nationales et internationales du sport populaire organisées par la FSGT dans le cadre de ses 80 ans.

D’où je vous parle

Du centre eps et société qui publie la revue contrepied qui se préoccupe surtout de
la transposition de la culture sportive et artistique dans le monde scolaire, lieu des apprentissages pour tous les jeunes. et qui cherche à promouvoir la transmission de cette culture par son appropriation critique.

rappel du thème :

Contextes évolutifs, adaptation des pratiques sportives, innovation.

Quel contexte ?

  • confusion activité physique et sport : stats( du déplacement pour aller faire ses courses, à la pratique régulière d’un sport)
  • peu de pratiquants surtout milieu populaires et filles-femmes
  • instrumentalisation : mis au service de :santé, citoyenneté, paix sociale…
  • la représentation dominante autour de la haute perf , de ses dérives médiatisées conduit l’EN à le considérer comme incompatible avec les missions éducatives de l’école et cherche à diminuer tout ce qui en serait responsable : perf, compét pour mettre en avant le plaisir : groupe aeeps, et une conception biologisante de la santé pour la vie, mettant à distance la formation immédiate des jeunes.

Il y a un pb avec le sport et pourtant un succès planétaire à la fois,traduit par sa médiatisation, la créativité permanente du secteur, une rente économique, des pratiques sauvages qui ne rendent pas compte d’un ensemble de pratiquants ( hors stats), mais qui ne concernent que de façon marginale les filles et les moins éduqués physiquement.

On peut dire que c’est en fait le système institutionnalisé qui a un problème avec le sport : les fédés, l’école.
Pour nous, l’eps porte une responsabilité malgré sa popularité( adhésion des jeunes), sport scolaire, ( innovations) mais l’échec malgré les tripatouillages (filles, plus faibles), la pérennité de pratique n’est pas assurée.

Hypothèse

Nous faisons l’hypothèse que les tentatives pour attirer de nouveaux publics sous forme d’adaptation autour notamment de pratique plaisir, ou loisir ou encore santé ne sont pas la bonne réponse non seulement aux besoins mais encore au droit légitime pour tous d’avoir accès aux aps et de s’y développer.

Nous caractérisons ces tentatives d’adaptation comme des phénomènes de désportivisations

D’un côté l ‘instrumentalisation. Ce sport à minima lui conteste sa qualité de culture, le réduit à une utilité sociale, loin du droit fondamental qu’il devrait être. Il prive ainsi les pratiquants de tout ce qui fait lien avec ce qui fonde sa valeur universelle, les savoirs accumulés, tant du point de vue des pratiques que des connaissances, pour ne leur donner accès qu’à un ersatz peu convainquant. En même temps, dans cette tentative de détournement, ne négligeons pas la mobilisation de pratiquants improbables qui découvrent, voire se fidélisent, sous des formes et des exigences, qui sans être totalement conformes au défi sportif, attirent et multiplient le nombre de pratiquants( courses à thème). C’est dire l’attrait potentiel.

D’un autre la financiarisation qui en fait un ypersport où le profit est central, avec ce qui l’accompagne, tricherie, spéculation, gigantisme, où il faut gagner à tout prix, où tous les moyens sont bons pour y parvenir, système mortifère qui met à distance la « glorieuse incertitude du sport », allant jusqu’à travailler en profondeur, les règlements, les techniques, l’imaginaire sportif. Pratiques globalement excluantes pour les non performants à priori, les non motivés, les trop différents du modèle. Provoquant l’émergence de la revendication d’un altersport ? En même temps là aussi, ce système produit aussi de la création, avec des pratiques sauvages qui mettent au défi les fédés de les intégrer( BB), d’autres extrêmes qui entrainent de nouveaux aménagements des espaces et des règles, ou encore de la confrontation, de l’échange sur un mode pacifique, dans les compet de haut niveau.

C’est bien un monde vivant, particulièrement perméable aux soubresauts de la société actuelle, véhiculant tant ce qui intègre que ce qui exclu, et notamment les couches populaires et parmi elles les filles, là se situe la question

Comment faire pour faire face à ces contradictions ?

le sport institutionnalisé qu’il soit fédéral ou associatif, n’est pas fondamentalement organisé pour répondre à l’ensemble des besoins, des motivations, des obstacles, liés à la pratique sportive et notamment à celle des milieux populaires. Je vous laisse répondre dans ce domaine.
Pour ce qui concerne l’eps à l’école dont la fonction est de faire apprendre à tous, il y a des conceptions, des formes, des contenus, des objectifs qui sont incompatibles avec la réussite de tous dans l’accès à ce domaine de pratiques et de connaissances.

Pourquoi : à cause des considérations ci dessus évoquées qui renvoient essentiellement à l’idée que le sport n’est qu’un sous produit, non fondamental( voire socle) pouvant être mis au service de, et quand on est porté par ce point de vue, on a des mises en œuvre qui lui correspondent. Nous voulons lui substituer une vision du sport culture à l’instar de ce qu’en disait B.jeu :
« création collective, instinctive, continue, dynamique grandiose de l’imaginaire, le sport traverse avec assurance l’histoire des peuples et n’a pas été inventé, au cours des âges, sur décisions des princes, ou recommandation des philosophes. Il est vivant, populaire, spontané. Il est émotion, il est passion ».

C’est à ce titre qu’il doit, qu’il mérite d’être enseigné et donc accessible à toutes et tous
Ce qui implique :

  • 1. clarifier des options fondamentales :
    • ils sont tous capables, contraire à l’option dominante qui voudrait que certains…
    • nous voulons en faire des pratiquants lucides, des spectateurs critiques, des citoyens acteurs de leur choix de pratique. Donc des jeunes émancipés de toute dépendance, tant des modèles dominants, que des stéréotypes de genre, ou encore des émotions qui paralysent, de la pesanteur qui maintient au sol…
    • On ne forme pas les jeunes aux activités sportives mais ils se forment en se confrontant aux motifs( le pourquoi faire ) et aux modalités( comment le faire) d’objets construits au cours de l’évolution, cad à la culture, qui dans notre champ renvoie à la notion de technique
  • 2. chercher à valoriser des mises en œuvre, des modes d’entrée, des modalités d’apprentissage qui mettent en avant :
    • la question du sens des activités avec la confrontation aux règles comme conditions du jeu ensemble mais aussi comme pouvoir nouveau, espace de liberté… et non comme une succession d’interdits.
    • l’accès aux compétitions qui n’excluent pas, qui cumulent les résultats des meilleurs et des plus faibles, qui mettent au défi, qui transforment les représentations initiales et rendent possibles des exploits imprévisibles, sortent des stéréotypes pour générer de l’égalité garçons filles.
    • des contenus exigeants, avec des performances significatives, car c’est dans leur appropriation, que les jeunes se transforment réellement, qu’ils en tirent plaisir, gage d’une pratique durable.
  • 3. S’organiser pour rendre compte de la manière dont s’enseignent les techniques, afin d’aider aux progrès, les techniques étant l’expression de la culture.

La diffusion

C’est avec ces éléments que nous élaborons une problématique autour d’un thème d’étude et que nous allons à la recherche de pratiques qui donneront lieu à une production.

Ce sont les numéros de cp (tirage 10 000 exemplaires).
Avec les crp et les éclairages qui les complètent, issus de points de vues divers, nous proposons un modèle de partage et d’échange, des propositions qui ne laissent pas les enseignants seuls face à leurs difficultés mais aussi avec leurs trouvailles.
Nous avons là un outil de diffusion que nous complétons aujourd’hui avec un site ouvert qui ne demande qu’à se développer.
Des débats décentralisés autour de la parution d’un numéro avec on non la participation d’auteurs ou de concepteurs du numéro.

jean pierre Lepoix.