Quelle éducation physique, sportive et artistique (EPSA) pour l’avenir ?

Temps de lecture : 3 mn.

Contribution signée Jean-Françis Gréhaigne, professeur honoraire des Universités en STAPS

Notre éducation physique, sportive et artistique (EPSA) repose sur des expériences sportives et artistiques menant à des émotions et du plaisir et des connaissances. On n’est plus au temps des facteurs de la valeur motrice ni, comme les Canadiens, « en éducation physique et à la santé ». On dispose désormais d’assez de recherches et de témoignages d’enseignant·es et d’élèves pour soutenir l’idée que l’EPSA est une forme d’éducation précieuse et motivante.
Mais à l’école, lieu où on accueille tout le monde, qu’apprend-on et comment ? Ce n’est pas clair pour tout le monde. Aujourd’hui, « on va en sport » ! Pourquoi a-t-on abandonné l’usage du vocable EPS ? Le faible temps scolaire, l’éclectisme ou le zapping d’APSA, les classes trop nombreuses sont autant d’obstacles, ainsi que l’inspection générale d’EPSA incapable de proposer des programmes cohérents.

Éducation Physique et Sportive : un peu d’histoire

Il y a 51 ans, le journal «L’Équipe» du 8 novembre 1969 titrait : «Les professeurs d’éducation physique sont-ils périmés ?». En 1976, Robert Mérand répondait indirectement à cette question : « Le pouvoir d’agir ne peut pas se réduire à une simple acquisition instrumentale de savoir-faire, de techniques sportives ou corporelles. Il convient de mettre l’élève en possession des structures relationnelles essentielles qui font du corps un instrument d’action et donnent la possibilité d’en exploiter
toutes les ressources. Il faut donc ouvrir chacun à l’activité créatrice du corps agissant ». (in « L’École et la Nation » n°263) Je m’inscris dans cette option.

Sportivisation et entraînarisation

L’EPSA a influencé les pratiques sociales de référence. Une forme de scolarisation des entrainements a été introduite par des formateurs à la fois enseignants d’EPSA et entraîneurs de club. En sport collectif, à la place du footing et du jeu, les entraînements ont été conçus avec des plans de leçons du type : échauffement, partie technique puis tactique et enfin jeu. Cela a fini par engendrer une confusion entre les didactiques de l’EPSA et les didactiques des « écoles » de sport. Pourtant les objectifs de ces didactiques diffèrent sur le fond avec un temps de pratique impossible à comparer (beaucoup plus court pour l’école) et un constat : le sport n’est pas confronté à la nécessité d’accueillir tous les jeunes.
A contrario, le fait d’avoir abandonné aux fédérations sportives la production des connaissances, a engendré une forme « d’entraînarisation » des leçons de sports collectifs. Les horaires insuffisants, les cycles trop courts, un public scolaire hétérogène, le manque de temps, construisent l’échec des élèves

Ne pas confondre sport et EPSA

Aujourd’hui, l’interchangeabilité Sport / EPSA conduit à la confusion « jeunesse à éduquer » et « consommateur de sport » guidé par un coach plus ou moins formé. L’École est un milieu spécifique : les fins poursuivies, les conditions d’exercice de l’activité physique, la jeunesse des acteurs commandent de refuser les analogies apparentes avec d’autres pratiques socio-techniques, même de référence.
L’éducation physique, sportive et artistique, discipline d’enseignement, se doit de former un adulte physiquement actif. Enseigner l’EPSA consiste à mettre les élèves en situation de double activité :
les amener à faire, agir, pratiquer des activités physiques et sportives, en interaction avec leur environnement et, en même temps ou dans un autre temps, à réfléchir, à s’interroger, à raisonner
sur ce qu’ils sont en train de faire ou ont fait. L’apprentissage ne peut pas se concevoir sans une pratique importante tout en nécessitant une prise de distance avec l’immédiateté de cette
pratique.

Développer les recherches en didactique de l’EPSA

Pour agir pleinement sur l’apprenant, la recherche sur l’enseignement de l‘EPSA doit être développée. Pour des raisons institutionnelles de reconnaissance mais aussi de conceptions de la recherche, l’objet « enseignement » étant peu propice aux recherches expérimentales pures, ce type de recherches ne s’est développé que très lentement en France et dans le monde.
Néanmoins, quelques équipes s’attachent à développer les compétences et les connaissances à enseigner et apprendre en EPSA. Leurs résultats montrent que pour de réels apprentissages,
il faut donner aux élèves suffisamment de temps sinon on en reste à l’émergence de réponses nouvelles jamais stabilisées …

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