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Apprendre à lire c’est apprendre à rendre intelligibles des signes dont le sens reste caché tant qu’on n’a pas entrepris de les relier pour en avoir une compréhension globale.


Accéder à cette compréhension peut sembler théorique mais c’est aussi (et surtout) pouvoir agir à bon escient, déclencher l’action au bon moment et la réguler si nécessaire.
Le jeu, jouer, c’est souvent bouger, jouer avec ou contre, voire se jouer de, afin de produire un effet sur soi et sur les autres. C’est un défi d’y parvenir qui procure plaisir ou déception et entraine souvent une envie d’y revenir pour revivre ou mieux vivre le résultat. On peut jouer dans sa tête en étant immobile, on n’en joue pas moins avec l’autre par exemple pour déjouer ses projets et faire aboutir les siens : c’est l’exemple du joueur d’échec qui joue plusieurs coups avant de déplacer le pion… C’est qu’il s’agit de prévoir pour pouvoir  !

On va donc tenter de «lire le jeu » : On imagine bien le grimpeur concentré sur sa voie pour en lire les différents passages et concevoir, à priori, ses façons de faire, d’aborder le « pas » difficile pour être bien placé pour ce qui suit ; le slalomeur qui mémorise les virages pour ne pas se laisser surprendre par un écart de tracé, mais il s’agit là d’anticipation avant… « la mise en jeu ».

S’agit-il alors de la même lecture dans toutes les APSA ? Les prises d’informations signifiantes et efficaces sont-elles semblables, selon que l’on s’engage seul ou avec plus ou moins de partenaires et d’adversaires, dans un espace plus ou moins grand, pour atteindre des cibles plus ou moins protégées, avec un engin ou pas, pour réaliser une performance, gagner une compétition…

Que faut-il lire alors, et quand, avec quel regard, quels indices ? Alors, complexe, multiple, différente ou simplement transversale la lecture du jeu ?
Quel rapport entre une évaluation de plus en plus rapide de l’état du rapport de force à un endroit donné autorisant telle action susceptible d’aboutir, ou encore le pari fait sur la manière dont va se comporter l’adversaire direct compte tenu de son placement et de ses habitudes de jeu pour l’utiliser à son avantage… et l’appréciation de la force et la direction du vent, des performances de ses adversaires lors d’un concours de saut à la perche ? Tout le monde joue mais pas au même jeu. Sans aller à ces extrêmes, l’appréciation du déplacement à opérer pour se démarquer requiert-elle les mêmes qualités au Volleyball et au rugby ? Ce qui apparait, ce qu’on cherche à voir, est-ce de même nature ? De quel code faut-il disposer, est-ce toujours le même ? Du moins y a-t-il des incontournables, des permanences ?

Ce qui semble émerger de la formation des « joueurs » modernes, c’est qu’ils soient capables de déployer une activité permanente pour rendre intelligible, grâce à une observation « outillée », et de plus en plus vite, le type d’organisation de leurs partenaires et adversaires, susceptible d’entrainer une réorganisation favorable à leurs projets individuels et/ou collectifs. C’est un décryptage organisé du contexte toujours mouvant, déclencheur de décisions d’actions simultanées. Une sorte de jeu en lecture permanente.

Bien lire pour mieux agir disait-on, toujours lire en agissant dirait-on  !