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Quelle mouche l’a piquée, cette épique équipe, dont on attendait peu et qui nous a tant comblés ? Comment fut possible cette aventure handballesque qui se termina en apothéose et surprit, un dimanche, au moment du réveil de la sieste. On parla d’« un miracle Onesta », de cet entraîneur qui partit de deux demi-équipes pour n’en plus faire qu’une, et laquelle, à l’arrivée, surclassant son adversaire dans tous les domaines du jeu ?


Il y eut les barjots, il y a aujourd’hui les Experts une façon de donner corps, faire vivre une image de cette équipe qui vit et qui gagne. Comme au foot, en Allemagne il y a la Manchaft, en Italie, la Squadra Azura, au basket, aux USA, la Dream Team… On parle bien d’une entité globale et, au-delà du maillot qu’elle porte, on veut lui attribuer autre chose, qui veut mieux la caractériser, qui signifie le tout sans oublier les individus, mais mis au service de l’intérêt collectif. On peut s’y identifier, se reconnaitre dans cette valeur universelle.

Quand elle gagna, l’équipe de France fut plutôt dénommée la bande à Zidane du nom du meilleur d’entre eux, ou la bande à Jaquet du nom de cet entraîneur tant contesté, notamment par le journal L’Equipe, un nom bien mal porté du coup, qui avait du mal à comprendre le discours de celui qui faisait confiance à son groupe qui était en train d’émerger, en tant que tel, avec ce que cela portait, à ses yeux, comme promesses. Et puis, à ce moment de maturité, cela devint l’équipe blacks, blancs, beurs qu’on aimait regarder les yeux dans les bleus… Un cap était passé, la construction s’était opérée, on parlerait désormais d’un groupe, avec ce qu’il peut signifier en matière d’entraide, de solidarité…

Un groupe, donc, d’individus travaillant dans un but commun, avec des rôles et des taches définis, où les membres sont interdépendants. Mais autre chose aussi : c’est curieux comment, dès que l’on veut donner de l’importance à un témoignage de bonheur, de plaisir, surtout face à des défis importants, on en appelle à l’ambiance collective, au travail en commun, à l’état d’esprit partagé…

Un groupe, donc, d’individus travaillant dans un but commun, avec des rôles et des taches définis, où les membres sont interdépendants. Mais autre chose aussi : c’est curieux comment, dès que l’on veut donner de l’importance à un témoignage de bonheur, de plaisir, surtout face à des défis importants, on en appelle à l’ambiance collective, au travail en commun, à l’état d’esprit partagé…

à la vision d’une communauté heureuse de tirer dans le même sens, parce que le résultat sera forcément meilleur, et les conditions pour y parvenir tellement plus agréables, qu’on a envie de tout donner : écoutons les comédiens, les ingénieurs d’un bureau d’étude, les travailleurs dans leur coopérative… les sportifs ! Mes partenaires étaient là, leurs regards me donnaient confiance, j’avais envie de travailler avec eux… On a fait face, on s’est aidés, on n’a rien lâché !

Dans une société où le chacun pour soi, le star système, la quête du pouvoir personnel, la course aux égos… n’ont jamais été aussi virulents, c’est comme une bouffée d’air frais, la preuve que c’est possible, quand les médias nous disent l’inverse. Seulement c’est un effort, une construction, une conviction que le passage est bien là : l’équipe, le collectif où le but est clairement identifié pour tous, auquel tous travaillent à son atteinte et où chacun va devoir apporter sa propre partition pour se réaliser dans le même temps.

Une conquête parfois improbable dans les contraintes de temps imposées par des calendriers où la performance doit être au rendez-vous coûte que coûte, un aboutissement difficile à pérenniser, tant les membres de l’équipe sont volatiles, déplacés par le mercato, nouveaux hommes sandwich des firmes publicitaires, blessés par la succession infernale des compétitions…
Mais quand elle aboutit, un accomplissement dont chacun se souvient longtemps.

Cet article est paru dans le Contrepied HS n°9 dédié au Football