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Guy Petitgirard professeur d’EPS et entraîneur national à la FFHB. Après avoir entrainé l’équipe de France espoir, il est chargé de la formation des entraîneurs. Son propos consiste à consentir à l’aménagement des règles et du milieu pour rendre possibles les acquisitions des jeunes. Son audace en ce domaine devrait convaincre nombre de nos collègues.

La pratique scolaire

En matière de traitement des APS pour le milieu scolaire, tant qu’on respecte la spécificité de l’activité, on est dans les clous ! Jouer au HB, c’est s’opposer à deux groupes, en lançant la balle avec les mains, pour la faire progresser vers une cible verticale protégée par une zone, ceci étant finalisé par un duel tireur-gardien. Pour y parvenir il y a des « savoirs verticaux » valables à tous les niveaux de pratique. Par exemple le jeu dans le couloir de jeu direct (couloir qui va des épaules de l’attaquant aux deux poteaux du but), se développe à partir de compétences et de savoir faire à maîtriser. Ce couloir peut être libre, ou occupé par un défenseur, ou par un défenseur et un partenaire…De la même manière, apprendre à être gardien ce n’est pas tant apprendre à placer les bras ou les jambes, mais être capable de prélever des indices sur l’organisation du tireur et de traiter ces indices. à partir de là on peut s’autoriser tous les aménagements de règles possibles.

Cet aménagement doit être conçu pour assurer la protection des joueurs, préserver l’équilibre du rapport de force entre attaque et défense et faire progresser la balle d’une cible à l’autre.

Les règles

Il n’y a pas de règles définies au plan national, elles doivent être mises au service de la formation du joueur.

On peut faire varier : 
– le nombre de joueurs, 3c3 ou 4c4 plus un gardien ;
– l’espace de jeu, en long, en large, sur le terrain de BB ; espace et nombre de joueurs déterminent le nombre de touches de balle et de tirs par joueur.
– l’utilisation du dribble et du marcher ou non : un seul dribble pour un bon joueur par exemple ou démarrer par la course avec la balle dans les mains…
– les contraintes imposées à l’attaquant ou au défenseur : des petits débutants qui jouent avec la balle dans le ventre et la tête baissée peuvent jouer en touches de FB pour relever la tête et voir le jeu ; ou bien les défenseurs doivent tenir un ballon à deux mains et défendre pour ne plus accrocher les attaquants ; ou encore ne pas pouvoir redonner la balle au partenaire…
– les règles du match : des remises en jeu depuis la zone et non au milieu pour accélérer le jeu, ou encore 1, 2 ou 3 défenseurs en dehors des 9 m pour défendre….
Ces différentes règles sont des outils au service de l’enseignant. Elles seront utilisées pour favoriser l’acquisition plus aisée de compétences que l’enseignant a ciblées comme apprentissage chez le jeune joueur ou chez l’élève.

La constitution des équipes et les compétitions

Avec de telles règles, on quitte la conception de la composition des équipes à partir de savoir faire type passes, tirs, dribbles et on observe l’investissement, l’engagement du joueur dans le jeu ; la capacité à faire progresser la balle vers l’avant pour faire exister un duel tireur-gardien ; la capacité à récupérer la balle et se projeter vite vers l’avant. L’obstacle à éviter à tout prix c’est le stéréotype de « Verdun », deux équipes dans leur espace respectif avec une qui se fait des passes, (avec le plus souvent un tir par-dessus, type tir de mortier  ! !) et ce, jusqu’à l’interception ou la récupération de la balle par l’autre confinée devant sa zone.
Ainsi on va valoriser dans les compétitions des comportements qui seront pris en compte dans les résultats.
– Pour inciter à jouer jusqu’au bout malgré la défaite : ne perdre que d’un écart de 2, ou 3 buts.
– Pour conserver la concentration, se centrer sur les buts de maitrise et pas seulement de compétitivité : valoriser les buts sur « jeu de grand espace » (contre-attaques).
– Pour favoriser le jeu finalisé par l’atteinte du but : valoriser l’accès
10 à 12 fois à la cible dans un match…
Ces aménagements doivent être complétés par un arbitrage adapté lui aussi au niveau de jeu.

L’arbitrage : les règles à faire respecter impérativement 

Les bras doivent servir d’amortisseurs ou de contrôle : ni arme contre, ni attrapé de l’adversaire. Cela signifie qu’il faut apprendre aux joueurs et aux arbitres comment mieux défendre afin de récupérer la balle, car si on attrape, on évite peut-être momentanément le but mais on ne récupère pas la balle.
On peut proposer le jeu suivant : « il reste 2’ à jouer et notre équipe perd de 2 buts, comment faire ? » On assiste alors à un changement spectaculaire des comportements des joueurs qui s’évertuent à récupérer la balle tout en empêchant l’accès à la cible et ce, sans commettre de fautes.
Il faut être intransigeant sur le ceinturage et le risque de mettre en péril : pour cela il faut donner la priorité aux sanctions disciplinaires par rapport aux sanctions sportives.
– En défense on parle de cylindre de défense, espace compris entre le bout des doigts (bras tendus) et le tronc du défenseur.
– Si le duel attaquant/défenseur a lieu de face (attaquant dans le cylindre de défense du défenseur) il ne peut y avoir d’attaque au visage ni de poussée sur le tronc pour déséquilibrer l’attaquant vers l’arrière.
– Si le duel attaquant/défenseur a lieu sur le côté du cylindre de défense, il ne peut y avoir ni « cravate », ni poussée latérale, ni croche pied, ni attrapé de bras.
– Si le duel attaquant/défenseur a lieu avec le défenseur derrière l’attaquant, on ne peut retenir par le maillot, les bras, ou pousser dans le dos. Toutes ces fautes doivent être sanctionnées sans équivoque comme le ceinturage si celui-ci conduit à l’interruption répétée du jeu. Les cartons et les exclusions temporaires (2 minutes) sont destinés à ça.

Comment faire jouer 30 élèves dans un gymnase?

On peut choisir de faire du 3c3 plus un gardien, en large, sur trois terrains, avec une zone à 5 m matérialisée par des coupelles ou des plots ou des lignes plastiques… Si on a un gymnase type C : 4c4 plus un gardien, en large, avec des buts faciles à installer, type décathlon par exemple ; on choisit des balles
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qui ne font pas mal, qui rebondissent (on peut commencer aussi avec des balles mousse) et que les jeunes peuvent tenir d’une main. Avec 2 arbitres et 2 managers si besoin par terrain, cela permet à une classe entière de jouer.
Répartis ainsi on peut également faire fonctionner des ateliers de tir : avec les buts existant, cela fait 8 ateliers donc trois tireurs et un gardien, beaucoup de tirs et rotations pour permettre à chacun d’être alternativement gardien et tireur. Si les filles ne parviennent pas à marquer avec un gardien garçon, celui-ci « goale » avec un ballon dans les mains qu’il tient à 2 mains. Si certains ne savent que tirer en force, on peut mettre un 2e gardien derrière le premier, sur la ligne de but. Le tireur doit battre le premier gardien, cependant le joueur sur la ligne (2e gardien) doit attraper la balle, ce qui implique que le tir ne peut pas s’effectuer en force. Le tireur devra utiliser d’autres savoir-faire (lob, feintes, tirs à effets…..).
Tout dépendra ainsi des objectifs poursuivis qu’on ne pourra atteindre que si l’on s’autorise à des aménagements importants des règles, des espaces… se délivrant ainsi de stéréotypes sclérosants.

Le matériel : taille du ballon et colle pour les débutants aussi  !

Pour que les jeunes joueurs soient capables de jouer sur les trajectoires de balle, les rebonds, qu’ils soient confrontés aux mêmes sollicitations, aux mêmes effets produits que les joueurs de haut niveau, il est nécessaire qu’ils puissent manipuler le ballon à une main.
La taille du ballon est donc essentielle. Il est possible aussi d’utiliser de la colle : elle permet de mieux contrôler la balle pour l’attraper, elle permet aussi de trouver de nouvelles trajectoires, d’amplifier les rebonds. La colle joue le rôle d’un velcro, et conjuguée à une taille adaptée, elle permet à des débutants d’entrer dans une « activité technique ».

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Cet article est paru dans Contrepied HS N°6 – HandBall – Mai 2013