Agir pour un autre olympisme

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Texte d’orientation du SNEP-FSU. Depuis longtemps, le SNEP défend l’idée que l’EPS, le sport scolaire et les pratiques sportives pour tous et  toutes doivent contribuer à la construction d’une alternative humaniste et émancipatrice pour le sport. C’était là une des voies portée lors des « EPSiliades » en 2010 et du colloque « sport demain, enjeu citoyen » organisés par le SNEP et le centre EPS et société.

L’aventure sportive humaine, que devraient porter les grands événements sportifs, tourne de plus en plus à la mésaventure par la soumission accentuée aux intérêts de grands groupes capitalistes internationaux.

Après les années 60, on constate le passage progressif d’un olympisme marqué par les rapports de force internationaux, la montée du tiers monde, les illusions d’un sport socialiste, à un Olympisme marqué de plus en plus par la médiatisation, la marchandisation et l’ingérence des sponsors y compris dans la réglementation des sports. Les grandes compétitions sportives et en particulier les jeux, sont devenus pour une part une gigantesque machine économique et médiatico-idéologique, constituant une des bases du pessimisme à l’égard du mouvement sportif lui-même. Pour autant, les jeux restent à l’image du monde, de sa diversité, une grande fête populaire, parfois enthousiasmante et encore généreuse, pouvant participer à l’amitié entre les peuples et à la paix dans le monde.

Pour sa part, le SNEP souhaite que soit relevé le défi d’un autre Olympisme. Conscient de la difficulté et de l’ampleur de la tâche, nous entendons contribuer à la définition d’une ligne cohérente pour la transformation des jeux dans toutes leurs dimensions : économique, idéologique et purement sportive. Des forces sociales existent en France, en Europe et dans le Monde pour travailler en ce sens. Alors l’idée d’un autre Olympisme passe-t-elle par le soutien aux Jeux ou conduit-elle à les rejeter en bloc ? Pour le SNEP, l’alternative n’est pas entre une approbation sans critique et un refus sans nuance.

Reste une question primordiale et récurrente : quelles transformations proposer pour que les Jeux deviennent émancipés, émancipateurs, populaires, humanistes, et internationalistes ?

Il nous faut surtout, dans le prolongement de « l’appel de Paris » lancé lors du forum SNEP de 2005, de la résolution « Pour une EPS de qualité et un sport éducatif pour toutes et tous » votée au congrès de 2011, de l’appel des femmes « un sport universel pour des droits universels » et dans le cadre de nos dix propositions « pour rendre le sport émancipateur », mener le débat et l’action sur ce thème en cherchant à élargir les partenaires potentiels.

Les propositions soumises au débat par le SNEP lors des précédentes olympiades, et retravaillées lors du colloque « Sport Demain, Enjeu Citoyen » pour la transformation des JO restent pleinement d’actualité :

  • La France devrait d’abord être exemplaire en matière d’éducation physique et sportive à l’école et de sport scolaire, comme elle devrait l’être pour le développement du sport populaire avec un service public du sport redynamisé, ceci assorti des équipements et des financements nécessaires.
  • Sur un plan plus sportif, la France devrait réaffirmer son intransigeance dans la lutte contre le dopage et la traduire par des actions concrètes.
  • Les Jeux ne doivent pas servir de diversion médiatique à la misère et à la violence du monde actuel.
  • Les conditions – biologiques, psychologiques, sociales, culturelles, éco- logiques, éthiques, etc. – dans lesquelles peut se développer le sport comme possibilité d’un progrès humain, doivent faire l’objet d’un débat démocratiquement conduit.
  •  Un combat doit être mené sur les valeurs et la signification de l’événement pour permettre à celui-ci de s’installer véritablement sur le terrain de l’humanisme, de l’émancipation et de la solidarité. De ce point de vue, le sport et les Jeux ne doivent pas avoir pour fonction politique de donner l’illusion d’un champ d’activités où la démocratie règnerait et  qui serait le reflet d’une société présentée comme «démocratique et égali- taire». Le fonctionnement des instances olympiques doit être démocratisé.
  • Ce combat doit inclure une action nationale et internationale qui impose aux sponsors et aux médias une éthique et des obligations : renégociation des cahiers de charges, totale liberté de la presse, accès des jeunes, des chômeurs, aide aux pays pauvres ; les Jeux doivent être un moment incontestable d’égale dignité des pratiques et des athlètes, visant par exemple à mieux intégrer le sport des handicapés. L’’accès des femmes, dans toutes les délégations, doit être effective. La laïcité doit y être respectée et demeurer un de ces fondements….
  • Il nous apparaît nécessaire et prometteur de réfléchir à un nouveau statut de la victoire et de la défaite, un nouveau rapport entre le gagnant et les perdants, une nouvelle conception de la compétition.
  • Il faut imaginer un nouvel « Appel de Paris », fondé sur « la déclaration universelle des droits de l’Homme», qui, s’inspirant de l’histoire de l’émancipation humaine et s’appuyant sur tous les mouvements qui l’incarnent aujourd’hui, propose des Jeux qui soient, dans l’esprit d’une excellence sportive humaine, un moment de solidarité concrète, une forme explicite de lutte contre les inégalités dans le monde, la faim, le sida, la dette, le racisme, le travail des enfants, la violence faite aux femmes, pour la Paix, le respect entre les peuples, le partage des richesses, le développement durable et la protection de l’environnement.

Le SNEP s’emploiera à en développer les conditions avec tous ceux qui le souhaitent. 

Le Secrétariat National du SNEP-FSU

Cet article est paru dans le Contrepied HS N°20/21 – MAI 2018 – Sport et Culturalisme