Annie Garnier montre comment un savoir se construit à la convergence du désir des élèves (image de soi), du choix didactiques de l’enseignant (les acquisitions) et des transformations à opérer dans l’activité des élèves (processus). Sa démarche comporte trois étapes : le temps de la mise en projet des élèves, le temps des hypothèses et de leur vérification, le temps de la transformation motrice.
Cet article est paru dans le Contrepied N°2 – » EPS : Au cœur des pratiques…« (1998)
Introduction
Comment l’EPS peut-elle être à la fois polyvalente et unitaire ?
Ce qui renvoie à la pluralité, ce sont les multiples supports de l’EPS. En fait, je préférerais dire les différentes formes de pratique sociale des APS. En EPS, proposer telle ou telle forme de pratique sociale, je dirais telle mise en scène de l’APS, c’est faire le pari risqué qu’elle sera pertinente pour les ados que l’on a en face de soi, que la porte est ouverte pour qu’ils puissent l’investir de leur imaginaire, que se développent des identifications, des défis, des épreuves, des plaisirs qui leur appartiennent. Je ne peux y accéder, encore moins le planifier, mais essayer d’en offrir l’opportunité. Comment j’essaie de le faire vivre en 6° de collège ?
Ce qui renvoie à l’unitaire c’est développer chez nos élèves des outils de pensée et les pouvoirs moteurs qui leur permettront de communiquer pour construire leur savoir et d’être actifs et critiques dans la construction de ce savoir.
Trois postulats sur le savoir et l’apprentissage
- Le savoir est à la fois un produit qui s’actualise dans un savoir-faire moteur nouveau, mais en même temps c’est un processus, le chemin qui y a mené. Le produit n’a de sens que référé au chemin qui a permis d’y arriver.
- Le savoir se construit socialement dans la classe. L’interaction sociale doit être alors au service de la révolution motrice escomptée.
- Apprendre est coûteux, parfois douloureux. Si le savoir-faire visé n’est pas fort dans l’imaginaire des élèves, pourquoi se mobiliseraient-ils? Le savoir visé est au cœur d’une double convergence : le travail de transposition de l’enseignant sur ce qu’il y a d’essentiel à apprendre et le désir des élèves.
Objectifs poursuivis dans le cycle
- Côté désir : savoir-faire le salto avant et arriver beau : droit, debout.
- Côté produit :
- tourner vite en s’appuyant sur le rôle des bras, système de repérage sensoriel avant, pendant et après.
- en rupture : déconstruire bras-système de repères par rapport au tapis pour le remplacer par bras-accélérant la rotation, déconstruire impulsion élévation des bras par placer les bras à l’oblique avant haute sur l’avant dernier appui.
- Côté processus :
- inscrire l’activité de l’élève dans la problématique : monter-tourner.
- déconstruire le système sensoriel qui spontanément privilégie l’impulsion et la réception comme temps forts de l’action pour construire un système de repérage par les bras, avant, pendant et après l’action.
- entrer dans une activité de résolution technique de type hypothético-déductif.
- identifier des besoins, travailler pour les combler.
Mise en œuvre du cycle.
La mise en œuvre passe par 3 axes, 3 temps, 3 types de situations.
On insistera ici sur la place, la fonction, et la nature de la situation de référence.
Systématiquement, ce que l’élève vient de travailler sur un espace, il cherche à le réinvestir dans la situation de référence. Celle ci est la colonne vertébrale du cycle d’apprentissage et est toujours présente dans l’espace gymnique et dans les perspectives de l’élève. Toute réussite n’a de valeur, aux yeux du groupe, que dans la situation de référence.
Elle comporte le dispositif matériel comme indiqué sur le schéma suivant, avec une possibilité de choix entre le trempolino et le tremplin (le tremplin ajoute 2 points à la valeur de la performance). Selon l’évolution du cycle et la nature des situations, elle comporte également le code, sous forme d’affiche, les juges et les spectateurs. L’espace de la situation de référence est ainsi composé en trois sous-espaces : celui des gymnastes, celui des juges et celui des spectateurs.

- Le premier axe : le temps de la mise en projet des élèves
Conditions : 1 séance de deux heures, 26 à 30 élèves, 1 gymnase.
Où en est-on dans le cycle ?
Les séances précédentes ont été consacrées à la construction du code gymnique, à la compréhension des axes de complexification des savoir-faire, et à la construction des règles de vie.
Première étape: s’opposer, décider.
Sur cette base et tous ensemble, vote de la classe : quel savoir-faire souhaitez-vous apprendre et réaliser collectivement en vue des interclasses et qui soit réalisable par tous ?
Depuis 5 ans, les élèves choisissent le salto avant, quelques-uns le salto arrière et hésitent pour le saut par renversement.
Deuxième étape : faire et débattre.
Est-ce qu’on sait le faire ? Et à quoi voit-on qu’on sait le faire donc que c’est réussi ? Dispositif : 4 ateliers, 8 groupes de 4, affinitaires (graphique 1).
Sur chaque espace, à tour de rôle, un groupe réalise les saltos et un groupe note et classe les réalisations en référence au critère de maîtrise de la réception. On compare le classement des deux groupes et on formule les points de désaccord.
Troisième étape : faire et s’opposer.
Tous ensemble au tableau, chaque couple de groupes annonce les critères retenus et les points de désaccord (graphique 2).
1er groupe | 2è groupe | 3è groupe | 4è groupe | |
C’est encore mieux quand (25/20) | ||||
C’est réussi quand (20/20) | ||||
C’est presque réussi quand | ||||
C’est pas du tout réussi quand |
Graphique 2
Pour construire le code, on relève les points de divergence qui portent le plus souvent sur la hiérarchisation des réceptions suivantes : arriver sur les fesses et sur les pieds en même temps, arriver sur les pieds et retomber sur les fesses, arriver sur les pieds et tomber en avant.
Comment est prise la décision ?
De deux façons : on part tous expérimenter les propositions pour savoir ce qui est le plus facile et plus difficile, sur quoi le plus grand nombre d’élèves réussit, ou bien en validant à la compétition suivante. En cas d’impossibilité, l’enseignant décide, momentanément, de façon autoritaire.
Quatrième étape : faire, s’opposer et débattre.
On utilise le code lors d’une compétition. Le code permet-il de classer ?
Question : quelle note attribuer ?
Ce qu’ils doivent avoir posé à l’issue de cette séance c’est le primat de la réception sur les pieds, équilibrée voire enchaînée avec un demi-tour pour les plus forts, le primat du déséquilibre avant sur le déséquilibre arrière à la réception (même dispositif).
Réponses motrices : (graphique 3)

Les réceptions basses et groupées sur les pieds sont dévalorisées. Réussir le salto avant c’est pour eux satisfaire le critère le plus exigeant du code.
Cinquième étape : le bilan.
Chacun va coller son nom (post-it) sur les critères de réussite qui viennent d’émerger dans la colonne correspondant à ce qu’il réussit le plus souvent (4/5).
Sixième étape : l’évaluation
Une note individuelle sur le niveau de réalisation du savoir-faire sur la base des critères que la classe a construits et une note collective appartenant au groupe sur la somme des progrès réalisés par chacun. La note est attribuée par le prof et les élèves des autres groupes.
Constitution d’équipes de 4, hétérogènes.
Problèmes, tensions liés à cette démarche :
– L’éternel déchirement entre prendre son temps pour faire construire les critères de réussite que j’aurais pu afficher au tableau en 5 minutes. Pourtant je sais que si je les donnes moi, il faudra une à deux séances pour que certains élèves les intègrent, voire plus. Construire le but et le sens du progrès est primordial pour apprendre. Pourtant pour les élèves plus scolaires les annoncer aurait suffi.
Pendant ce temps j’aurais pu les faire avancer sur le plan moteur alors qu’ils n’ont fait qu’optimiser ce qu’ils savaient déjà faire. Mais cela n’est-il pas nécessaire ? Ne faut il pas donner le temps de jouer sur le registre moteur que l’on possède jusqu’à ce que l’on ne puisse plus réussir ainsi ?
– Le groupe affinitaire, si on s’y sent bien a des effets pervers. On s’y sent tellement bien qu’on oublie pourquoi on est ensemble. Ou bien, on n’ose pas contredire le copain que l’on apprécie. Alors quel débat, quelle confrontation ? Et puis il reste toujours des « canards boiteux » que personne ne veut. Groupe affinitaire à l’envers ? En revanche des conflits de groupe à groupe il y en a. Mais comment passer de l’opposition à la confrontation, comment raisonner sur des formes corporelles et pas sur des personnes. Comment faire accepter le fait que ne pas avoir raison n’est pas une négation, un rejet de la personne ?
– Enfin, en intervenant sur des conduites à risque (remplacer trampoline par tremplin pour éviter de monter trop haut) en centrant délibérément la construction des critères de réussite sur la forme de la réception, je ne transforme pas pour autant leurs représentations. Je les évite seulement. Ça va forcément revenir !
Deuxième axe : Le temps des hypothèses et de leur vérification
Emettre des hypothèses collectivement ou individuellement, les vérifier, les rejeter, ou les conserver, c’est passer de la centration sur le but à la centration sur les moyens de l’action.
Conditions : 1 à 2 séances de 2 heures, 26 à 30 élèves, 1 gymnase.
Première étape : trouver des solutions et débattre.
Répondre individuellement, par écrit, à la question : quelle est l’action qu’il faut faire avec son corps pour arriver sur les pieds ? L’afficher.
Avant de répondre, regarder ceux qui font des saltos, ceux qui réussissent et ceux qui échouent. Discuter. Essayer soi-même.
Dispositif : 4 espaces identiques, 8 groupes hétérogènes (forts et moins forts).
Les réponses observées : (graphique 4). Les réponses affichées tournent autour de :
– il faut monter haut
– il faut taper fort sur le trampoline
– il faut prendre beaucoup d’élan
– il faut se mettre en boule
- il faut monter haut

Deuxième étape : essayer et vérifier les solutions proposées.
Tâche pour le gymnaste : faire comme d’habitude.
Dispositif : un repère pour vérifier la hauteur du salto (graphique 5).

Tâche pour l’observateur : repérer la hauteur maximum du bassin dans le salto avant.
Bilan collectif : à quelle hauteur monte le bassin de ceux qui réussissent ? Y en a-t-il qui réussissent sans monter haut ? Que conclure, monter haut est-il indispensable ?
• Il faut beaucoup d’élan.
Même procédure que nous ne développons pas.
• Il faut se mettre en boule.
Même procédure que nous ne développons pas.
Le but de cette séquence est d’amener les élèves à répondre non pas « il faut » mais « ça dépend ». Ça dépend de quoi? Et c’est là la plus grande difficulté : ça dépend des rapports que le sujet actif met entre les différentes variables. Exemple : s’il tourne très vite, il peut tourner déployé.
Ils doivent découvrir que le savoir est une mise en relation de données ouvrant sur des possibles multiples et non pas une solution valable en toutes circonstances. Cette démarche est difficile, il ne faudrait pas laisser croire ici que les élèves accèdent à cette maîtrise en quelques séances. C’est toute la logique de l’enseignement scolaire qui est en cause.
Problèmes, tensions liées à cette démarche
– Comment s’assurer que tous aient accès à la parole, que tous soient entendus ? Le statut de certains élèves dans la classe (filles dominées, élèves en échec scolaire ou relationnel) les pousse à ne pas oser parler ou bien amène les autres à ne pas prendre en compte leurs propositions. D’autre part, leur habitude scolaire est telle que seule la parole du maître compte et elle finira bien par donner la solution.
Considérer les actions observées comme des données sur lesquelles il faut raisonner, c’est très difficile pour certains élèves. D’autant plus que la preuve n’est pas apportée par la logique de la démonstration mais par l’efficience de l’action. Or, la situation est complexe. Il est impossible d’isoler des variables qui seraient la cause ou l’échec de l’action. Initier les élèves à un raisonnement sur les probabilités et les mises en relation est encore plus difficile. Le raisonnement dogmatique de causalité simple est plus facile mais dangereux.
– Ce travail suppose un minimum de communication partagée. Or, certains élèves ne survivent à l’école que grâce à un camarade qui leur traduit les mots et tournures du prof en mots à eux. Comment leur demander de courir le risque d’échanger avec les autres ? Il faut apprendre les mots, acquérir un vocabulaire technique minimum et faire correspondre les actions correspondantes. Mais n’est-ce pas là la contribution de l’EPS à la maîtrise de la langue ?
– Enfin, ce travail de recherche collective suscite un vif intérêt. Mais l’incertitude qui lui est inhérente, le temps nécessaire pour aboutir, provoque une irritation qui ajoutée à la peur de se faire mal en gymnastique, à une réussite qui tarde à venir, peut entraîner désintérêt et comportements déviants. Un dosage dans l’activité est nécessaire.
Troisième axe : le temps de la transformation motrice
Construire et intégrer des repères corporels qui permettront de réaliser les solutions trouvées par la classe, à savoir : des repères pour rester groupé, pour placer les bras avant l’impulsion, déclencher la rotation par le haut du corps.
Conditions : 3 séances de deux heures, 26 à 30 élèves, un gymnase.
Première étape. Qu’est-ce j’ai besoin d’apprendre plus particulièrement ?
Dispositif : 4 espaces identiques et équipe de quatre élèves qui se mettent par deux.
Tâche : le gymnaste fait 10 saltos de suite. L’observateur remplit la fiche d’observation et en rend compte à son camarade (graphique 6).
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
Bras hauts avant le trampoline | x | x | x | |||||||
Bras lancés vers l’arrière à l’impulsion | x | x | ||||||||
Corps en boule en vol | x | x | ||||||||
Réception (critère de réussite) | Pieds | Pieds équilibré | fesses |
A l’issue d’une série d’essais, échange avec l’observateur pour dégager une priorité d’apprentissage.
Ce que font les élèves : ils se passionnent pour leur rôle d’observateurs, grosse centration sur un des trois points mentionnés sur la fiche.
Deuxième étape : coopérer pour apprendre.
En fonction des besoins repérés après échange avec l’aide et l’enseignant, constitution de binômes ayant les mêmes besoins et travail sur les espaces censés remédier aux besoins de l’élève.
Dispositifs : trois espaces gymniques correspondant à des besoins d’apprentissage différents et la situation de référence.
Pour utiliser les espaces on doit respecter ce mode d’emploi (règle de vie imposée) :
– jamais seul, toujours avec un observateur.
– jamais faire sans avoir lu la consigne, écouter l’information apportée par l’observateur.
– jamais un seul essai mais 4 de suite sur un même espace.
– jamais l’exercice pour l’exercice mais on essaie de le faire dans la situation de référence.
L’espace 1 : rester groupé.
La vitesse de rotation est telle que toute prise de repères sur l’extérieur est impossible. Je fais l’hypothèse que dans ces conditions l’ancrage perceptif est le contact tactile du corps sur le corps. On s’appuiera donc sur la continuité perceptive oeil/mains/tapis à l’impulsion pour la transformer en contact mains/genoux/jambes (graphique 7).

L’espace 2 : coordination avant-dernier appui et placement des bras à l’oblique avant haute, à l’impulsion.
Pour préparer l’action des bras dans la rotation, sans les utiliser dans l’impulsion, on cherche à faire correspondre la pose de l’avant dernier appui et le placement des mains vers l’avant dans le champ visuel.
Peu à peu on étalonne la course réduite à quelques pas. Les repères utilisés seront alors : le rythme, les appuis pieds, l’espace de course.
Les problèmes relatifs à ce type de travail dans les tâches proposées sont multiples.
– Dans la tâche 1 beaucoup d’élèves n’arrivent pas à reconnaître leur pied préférentiel. On peut jouer alors sur la longueur de la course d’élan et repérer avec lui quel est le pied qui provoque le meilleur équilibre.
Ce travail de latéralisation peut être fait systématiquement en échauffement : pas galopés, pas chassés latéraux…
– La tâche 2 entraîne beaucoup de perturbations et de tâtonnements. La perturbation est si grande qu’ils n’osent plus tourner. Il faut peut-être alors retourner à des formes simples de roulade avant avec pose des mains dans le tapis ou des formes ralenties…
– Dans la tâche 3 certains élèves transforment la tâche qui devient alors comment prendre le maximum de vitesse en un minimum d’appuis et oublient l’exigence de placer les bras.
Espace 3 : coordination impulsion et action des bras vers l’arrière pour accompagner (accélérer) la rotation.
Nous ne développerons pas ce chapitre.
Troisième étape : le retour du rationnel vers le sensible.
L’activité technique de construction systématique, mais aussi tâtonnante, des règles de l’action efficace pour soi, débouche dans le meilleur des cas sur une réussite systématique, régulière, dans la situation de référence, là où les apprentissages prennent leur valeur sociale. Cette compétence acquise se réduit peu à peu à quelques repères stables (sur soi prioritairement). Alors à cette étape, les élèves doivent faire l’effort de répondre aux questions :
Quand tu fais …quand tu réussis : à quoi tu sens que tu es en boule, à quoi tu sens que tes bras sont placés vers l’avant dans le trampoline, à quoi tu sens que tes bras te servent à tourner plus vite ?

4. Conclusion sous forme de problèmes généraux
– L’apprentissage s’appuie en grande partie sur les renseignements que l’acteur reçoit après chaque essai, de la part de l’observateur. Si les élèves parviennent à repérer les postures dans l’espace, ils ont en revanche beaucoup de mal à voir et à rendre compte de tout ce qui touche au temporel : vitesse, rythme, accélération.
– La panne de la dévolution. L’élève oublie …moi je dirais qu’il n’oublie pas mais change de logique. Il passe de la logique de l’apprentissage à celle du jeu de vertige et s’installe dans le plaisir immédiat. Et ça, il ne peut pas le dire au prof qui lui demande des comptes. Alors il dit qu’il a oublié et ça rassure le prof qui peut rappeler la consigne. Mais non il n’a pas oublié, il a fait autre chose, d’autant plus que ce genre de travail est coûteux sur le plan attentionnel. Et ce retour du libre arbitre, c’est plutôt rassurant !
– En ce qui concerne les choix didactiques opérés, si je ne remets pas en cause le fait de privilégier le tourner vite sur le monter haut, je me questionne, en revanche, sur le choix de ce qu’il y avait à apprendre pour tourner vite. En effet la quantité de rotation est en partie déterminée à l’impulsion par la position du centre de gravité par rapport aux appuis et à l’axe de la poussée. La posture groupée ou déployée, l’action des bras ne servent qu’à la ralentir ou l’accélérer. J’aurais donc dû, en toute logique amener les enfants à construire des repères d’inclinaison du corps à l’impulsion, mettre ces repères en relation avec la trajectoire et une quantité de rotation. J’ai fait l’hypothèse que ces repères étaient trop difficiles à construire pour des élèves de 6°, du fait de la brièveté de l’impulsion et du fait que ces relations sont hors du sens commun et donc fort difficiles à établir. J’estimais que la position des bras à l’oblique avant haute favoriserait le positionnement du centre de gravité. Pourtant n’est-ce pas ce qu’il manque à ces élèves qui chutent encore sur les fesses après le salto avant, en fin de cycle.
– L’unitaire et le polyvalent ?
Qu’est ce qui me permet de dire que j’ai apporté des solutions.
Si je me réfère à l’avant-propos du programme de 6° du collège je lis : « apprendre à apprendre, acquérir des méthodes de travail comme objectif prioritaire ».
Si je me réfère au programme EPS, je lis que l’EPS doit concourir au développement de l’autonomie et il me semble que mes élèves ont eu l’occasion de s’en rapprocher. Mais je lis encore dans l’avant-propos que les connaissances à acquérir ne peuvent être dissociées des pratiques et des compétences qui en permettent la mise en œuvre. Et je vais chercher dans le programme de 6° en gymnastique. Quelles sont les pratiques gymniques de référence et les compétences à enseigner ? Et là je me trouve en complet décalage :
– Je ne construis pas des gestes mais une posture qui me parait essentielle et symbolique de la gym.
– Je ne travaille pas sur des difficultés simples mais sur une difficulté complexe parce que mes élèves sont à l’âge des apprentissages moteurs avant les transformations de la puberté.
– Je ne les amène pas à construire une continuité des actions mais une action isolée.
J’avoue alors mon impuissance à amener mes élèves à opérer, stabiliser, généraliser des transformations motrices évidentes dans chacune des nombreuses compétences que le programme ne se hasarde d’ailleurs pas à préciser et mon impuissance encore, pour y arriver, à suivre une démarche d’apprentissage longue et coûteuse qui amène les élèves à être un peu plus acteurs de leurs apprentissages.
Quand la pluralité ne permet plus d’atteindre l’essentiel, l’unitaire !