Dominique Bronnec, enseigne au Staps de Rennes, dans cet article de 2017, il avance l’hypothèse que l’on peut proposer à des élèves débrouillé-es de terminale, une organisation offensive inscrivant des aspects du haut niveau, à certaines conditions.
Article paru dans la revue ContrePied HS n° 18, juin 2017.
Notre travail s‘inscrit dans une réflexion générale sur l’enseignement du volley-ball. Cette activité difficile à enseigner, par les exigences de la touche de balle et des envois frappés vers un partenaire ou le camp adverse, à focalisé les enseignants sur la maîtrise de la balle dans les conditions réglementaires. Il peut en effet apparaître que la touche de balle frappée est un préalable à tout échange et donc au jeu. Nous ne nions pas ce caractère contraignant. Les élèves doivent pouvoir adresser la balle là où ils le souhaitent. Cependant, nous estimons que cet aspect a relégué au second plan, le jeu et toute l’inventivité que les élèves doivent déployer pour marquer un point. Cet aspect est central car il est la substance du volley-ball. Le jeu pose, dès que les élèves s’y adonnent, des problèmes auxquels les élèves sont confrontés et qu’ils doivent résoudre. Cette recherche de solutions engage des transformations motrices, moins figées et stéréotypées que lors des apprentissages des gestes de la passe, de la manchette ou de l’attaque. Il permet également aux élèves de construire à plusieurs leurs réponses. Enfin, il déclenche de l’intérêt chez les élèves tenus de trouver des solutions efficaces pour marquer le point.
Engagement et mobilité des joueurs
Cette position pose l’engagement des joueurs et la mobilité comme moyens de préserver son camp et d’attaquer celui des opposants. La mobilité et l’engagement assurent le passage d’un enseignement statique à un enseignement dynamique. Dès lors que les élèves bougent et se mobilisent pour empêcher la balle de tomber, l’apprentissage du volley-ball, comme activité sportive, est sur une bonne voie.
Les règles successives proposées au cours de la scolarité permettent aux élèves de préciser les stratégies trouvées ainsi que d’affiner leur motricité de volleyeur. Les règles peuvent ainsi permettre d’accéder rapidement à la pénétration d’un joueur arrière dans la zone avant ainsi que des combinaisons entre attaquants. Le choix des règles adaptées, des dimensions du terrain, de la hauteur du filet, du nombre de joueurs présents par terrain, sont des variables nécessaires pour accompagner les transformations des élèves au cours de leur cursus.
Nous situons notre travail dans cette perspective et nous proposons à la suite de cet enseignement au cours des années de collège et de lycée, un aboutissement possible en terminale. Dès lors que les changements de zone et les engagements des élèves sont acquis et maîtrisés dans leurs grandes lignes, il est tout à fait envisageable d’axer l’enseignement sur la fixation des attaquants après engagement au centre.
La fixation
Pour fixer le contre adverse, un attaquant déchargé des tâches défensives comme la réception prend son impulsion près du passeur de façon à être « en l’air » au moment où le passeur effectue sa passe. On parle d’attaque « courte ». La fixation a pour but de placer les attaquants dans des conditions de duel favorables et donc d’ accéder sur le temps scolaire à un bon niveau de compréhension et de pratique d’un volley-ball moderne.
La fixation a pour but de placer les attaquants dans des conditions de duel favorables et donc d’ accéder sur le temps scolaire à un bon niveau de compréhension et de pratique d’un volley-ball moderne.
La pratique usuelle en classe de terminale
Le volley-ball est un sport collectif particulier dans la relation entre attaque et défense. Jusqu’à des niveaux de pratique, départemental voire régional en milieu fédéral, l’organisation collective offensive est indépendante de l’équipe adverse. Le ballon progresse vers une ‘’zone de marque favorable’’. Cette forme de jeu est la plus couramment utilisée en milieu solaire, jusqu’en classe de terminale à partir de jeu en 4 contre 4. Les systèmes de jeu mis en place peuvent valoriser une certaine incertitude spatiale en permettant de mobiliser 3 attaques potentielles.
Deux limites peuvent être identifiées. :
- le niveau stratégique d’organisation collective en attaque est pauvre puisqu’il ne vise pas une déstabilisation réelle du système défensif adverse pour faciliter le duel attaquant / défenseur.
- l’efficacité dans le duel à travers l’attaque smashée est difficile à atteindre pour de nombreux élèves car la maîtrise de cette habileté nécessite des ressources physiques qu’ils ne possèdent pas tous.
On remarque alors de nombreuses frappes pieds au sol, qui ressemblent à des smashs car la balle est frappée à une main mais qui donnent des trajectoires lentes en cloche souvent orientées vers le milieu du terrain adverse. Les élèves savent depuis le niveau débrouillé que l’on n’y marque pas le point.
Vers un volley-ball de fixation
Peut-on alors envisager, en VB scolaire, un système de jeu visant la désorganisation du système défensif adverse pour donner à tous les élèves plus de chances dans le duel ?
Des réserves sont fréquemment émises à ce sujet :
- La passe courte nécessite un passeur spécialisé à partir d’une observation et d’une adaptation fine liée à l’impulsion de l’attaquant en fixation
- Le temps d’impulsion est complexe à acquérir pour l’attaquant
- La qualité de réception est insuffisante en milieu scolaire pour pratiquer ce jeu car la zone de passe est très précise près du filet.
- Les joueurs en fixation (les centraux) ont de grands gabarits
Soulignons en réponse :
- que la passe courte est souvent plus simple à produire en milieu scolaire pour un élève moyen,
- que l’apprentissage d’un saut au centre est aisé scolairement. Il n’impose aucune manipulation technique,
- que la réception de service peut être simplifiée pour favoriser l’engagement du joueur au centre de l’attaque,
- que la hauteur du filet peut être adaptée aux possibilités des élèves.
Situation de référence
Nous proposons un jeu en 4c4 sur terrain de 7,5 ou 9 m de large et 7,5m de profondeur. Une zone de service est définie, variable en fonction de l’habileté en réception des joueurs mais généralement comprise entre les 3m et les 6m. En défense, le passeur et l’attaquant en fixation sont 2 contreurs potentiels qui se partagent 3 postes d’attaque (fixation et demie arrière pour le central et balle plus longue à l’aile pour le passeur). Le contre reste individuel et le non contreur prend place dans le dispositif défensif.
Remarques complémentaires :
- Contrairement au règlement fédéral qui impose un joueur arrière, nous laissons à tous les joueurs le statut d’avant. Cela évite, si l’on veut un jeu plus riche avec 3 attaquants, au passeur de devoir pénétrer et se replacer en zone arrière en phase défensive.
- On constate souvent un rapport de force déséquilibré en faveur de l’attaque car le contre est en difficulté et le filet est relativement bas. Pour renforcer la défense, un libéro, peut être ajouté. Le jeu se déroule sur des mini-sets de 5 ou 7 points gagnants sans rotation de postes afin de stabiliser les organisations.
- En fonction du temps d’enseignement et du niveau des élèves, cette situation de référence permet un jeu plus élaboré avec changements de zones simples (croix) voire fixation en tendue au centre. Des situations adaptées d’apprentissage sont envisagées.
Nous estimons que construire un système de jeu sur la fixation en classe de terminale est une possibilité pour l’enseignant, soucieux de favoriser la réussite du plus grand nombre des élèves, notamment ceux et celles qui ne disposent pas des qualités physiques leur permettant de gagner de nombreux duels face à une défense organisée.
Article de Dominique Bronnec, paru dans la revue ContrePied HS n° 18, juin 2017.