Les équipements sportifs, un bien commun

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Contribution signée Pierre-Yves Pothier, Groupe Equipements SNEP


Le contexte à la fois politique, sportif, sanitaire et écologique laisse à penser que le développement de l’activité physique et sportive est un sujet trop grave pour que l’école puisse le porter. Certes l’école n’est pas la vie mais la transmission d’un savoir ancré sur les APSA, lien sacré avec la culture contemporaine tant pour les filles que pour les garçons participe pleinement à la compréhension du monde qui les entoure.

Comprendre le monde n’est-ce pas partager la même humanité et un savoir à la fois critique mais aussi porteur d’émotion collective n’en est-il le garant. Cette EPS ambitieuse que nous appelons de nos vœux ne peut se passer d’équipements sportifs à la hauteur de cette exigence.

Cette EPS ambitieuse que nous appelons de nos vœux ne peut se passer d’équipements sportifs à la hauteur de cette exigence. Nous savons par expérience que l’espace stimule l’appétence. La qualité des installations et du matériel mis à disposition est donc déterminante pour donner envie aux élèves d’entrer dans les apprentissages et surtout d’y rester.


Les équipements sportifs et le contexte sportif

Le comité d’organisation des jeux olympiques et paralympiques veut faire de Paris 2024, les jeux les plus partagés de l’histoire. L’ambition affichée est d’importance puisque la santé, la jeunesse, l’égalité entre les femmes et les hommes, la transition environnementale sont les maitres mots. Explicitement c’est bien l’héritage qui est convoqué.
Donc, ce temps qui nous rapproche des JOP doit être l’occasion de penser autrement la question des équipements sportifs. Convoquer la jeunesse, gommer les inégalités entre les régions, multiplier sur l’ensemble des territoires, ruraux, urbains, les piscines et les équipements sportifs serait un signe fort de l’action politique. Offrir enfin à ceux qui ont si peu serait un vrai gage d’héritage.

Les équipements sportifs et la santé

De nombreuses études témoignent de l’impact positif de la pratique physique et sportive sur la santé des filles et garçons mais démontrent aussi que les adolescentes issues de familles défavorisées en sont les plus éloignées. L’école grâce à des équipements sportifs variés est sans doute la mieux placée pour éviter cette fuite en avant. Danser, jouer avec et contre, seul·e ou à plusieurs, courir, se renverser, nager, nécessite des espaces de qualité. A la polyvalence de certaines installations, des salles semi-spécialisées ou spécialisées doivent s’y associer. Permettre aux filles et aux garçons de vivre avec intensité une tranche de vie, d’affronter de nouvelles difficultés, inattendues, et trouver en eux-mêmes et grâce aux autres de quoi les surmonter sont un vrai gage d’une politique majeure en faveur de la santé.

Les équipements sportifs et la transition environnementale

Les JOP de Londres ont été les premiers à mettre en avant la notion d’héritage. Ainsi le projet global des JOP a mis au centre des préoccupations du monde sportif l’éco-conception des bâtiments avec un suivi de l’empreinte carbone de l’évènement. Pour autant, le mouvement massif de constructions écologiques et de rénovations n’a pas eu lieu.
Avec un plan de rattrapage de 200 millions plus 50 millions d’euros prévus par ce gouvernement, nous sommes donc très loin du New Deal Vert annoncé y compris pour les JOP de 2024. Il ne permettra sans doute pas de faire appliquer le décret tertiaire qui fixe les exigences de rénovation des équipements d’ici 2030. Augmenter la performance environnementale en maintenant ou en améliorant la qualité d’usage, rénover les équipements sportifs anciens qui représentent 2 fois moins d’émissions de carbone qu’une destruction-reconstruction et construire des équipements sportifs à haut niveau de performance carbone et énergétique serait un vrai gage en faveur d’une transition environnementale.

Les équipements sportifs et le contexte politique

Les 5000 équipements prévus dans le plan Macron ne répondent pas à l’exigence d’une lutte effective contre les inégalités constatées pas plus qu’ils sont une réponse aux problèmes rencontrés par les équipes EPS dans leurs établissements. Pourtant la responsabilité a été donnée au chef de l’Etat d’organiser les JOP en 2024 avec la promesse de faire du sport, un facteur d’éducation et d’inclusion. Avec de tels objectifs, la place de l’EPS devrait être centrale. Nous croyons que 4h d’EPS accompagnées d’équipements sportifs variées seraient plus efficaces que les vieilles recettes sans cesse recommencées la mettant en concurrence à l’intérieur même de l’école.
Interroger l’action publique en faveur des équipements sportifs sous l’angle éducatif, culturel et social conjuguée à un enjeu économique et d’aménagement du territoire prendrait une dimension politique nouvelle.


Quoiqu’on en dise ce contexte est porteur et le temps du militantisme n’est pas fini. Rester un enseignant lucide en faveur d’une EPS ancrée sur la culture contemporaine qui la traverse, l’associer à des équipements sportifs exigeants gage d’égalité est le pari qui est donné à notre profession. Cette vision globale de l’acte militant ne donne t-il pas plus de crédit au lien social que nous voudrions construire ? La place du professeur d’EPS est bien de refonder l’espoir